Les revenus des femmes rurales en Afrique peuvent parfois être risibles. Malgré toutes leurs contributions à l’entretien du ménage, leurs droits sont souvent restreints et elles n’ont presque pas voix au chapitre en matière de prise de décision.
Les pesanteurs culturelles accentuent leurs vulnérabilités. Dans les communautés à dominante musulmane vivant au nord du Nigéria, certaines «normes culturelles» les empêchent de participer pleinement aux activités génératrices de revenus, malgré leur volonté de s’y adonner.
Mais à Busawa, dans l’État du Niger, situé à environ 500 kilomètres au nord de la capitale économique, du Nigeria, Lagos, un programme d’autonomisation des femmes dirigé par le Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (PPAAO), a non seulement renforcé la dignité des femmes, mais il est en passe de modifier la perception des hommes dans cette partie du pays.
Hassana Douada, septuagénaire, est secrétaire d’une coopérative de femmes à Busawa. Hassana a bénéficié d’un fumoir de poissons, une technologie conçue par le PPAAO pour réduire les déchets et améliorer la qualité des produits et par ricochet, les revenus des utilisateurs. Le PPAAO a été mis en œuvre au Nigeria par le Centre national de spécialisation de l’aquaculture, composé de trois institutions.
À New Bussa, les efforts de sensibilisation ont été menés par l’Institut national de recherche sur les pêches en eau douce (NIFFR). Les femmes de la coopérative ont également reçu un prêt qui est accordé à tour de rôle à ses 40 membres tous les trois mois pour leur permettre d’acheter plus de poisson à fumer.
“Nos bénéfices ont augmenté de manière significative grâce à ce projet du PPAAO “, déclare Hassana.
“Non seulement nous avons enregistré une augmentation des revenus, mais nous avons aussi pu obtenir des fonds supplémentaires pour acheter d’autres aliments protéinés, en plus du riz. Aujourd’hui, je soutiens ma famille et je suis fière d’apporter mon soutien pendant les événements “, dit-elle avec un sourire.
“Maintenant, je peux rivaliser avec mes pairs. En fait, grâce à ce projet, notre dignité a été élevée” se réjouit-elle.
Busawa est un village à majorité musulmane. Les femmes sont confinées surtout aux tâches ménagères.
Mais comme elles commencent à soutenir leurs maris dans la prise en charge de leurs ménages, certains hommes ont commencé à les encourager à fumer du poisson.
“Je fais partie de ceux qui n’ont pas aimé l’idée de permettre à nos femmes de travailler en dehors de nos maisons. Mais depuis l’introduction du projet, ma femme soutient l’entretien de la maison “, explique Abdouhaman Souleymane, l’un des dignitaires de la communauté.
Pour ce père de 15 enfants et de 2 épouses, le fait que sa femme apporte un revenu supplémentaire à la maison est un vrai soulagement.
“Quand ma femme ou les enfants sont malades, non seulement elle va directement à l’hôpital, mais elle paie aussi toutes les factures” dit-il.
Souleymane est tellement convaincu aujourd’hui, qu’il encourage progressivement ses pairs à libérer leurs épouses pour qu’elles puissent travailler dans le fumage de poissons.
“J’encouragerai les autres à faire de même “, dit-il.
Les résultats de l’utilisation du four à fumer conçu par le PPAAO ont été si encourageants que certains hommes autorisent maintenant leurs épouses à faire du commerce sur le marché de New Bussa. D’ordinaire, les femmes mariées n’ont généralement pas le droit d’aller au marché sans être accompagnées. Pendant qu’elles fument le poisson, la commercialisation au marché est souvent réservée à leurs enfants ou aux femmes plus âgées.